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Pax Marocana

Vers une Pax Marocana


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Pax Marocana

La région Sahélo-Saharienne fait face depuis une dizaine d’années à une vague de radicalisation religieuse et de criminalité sous couvert de djihadisme, largement aggravée par l’intervention occidentale en Lybie. La chute du régime de Kadhafi, a fourni aux mouvements djihadistes dans la région une profondeur stratégique, en faisant de la Lybie un « no man’s land » hors de contrôle, leur donnant accès à des stocks d’armes dont ils ne rêvaient même pas. L’effondrement du subtil équilibre tribal mis en place par Kadhafi a créé une situation de chaos dans le pays, favorable à l’implantation de mouvements terroristes comme Al-Qaïda (qui devient AQMI) et comme DAESH, qui, par effet de contagion, a rallumé d’autres conflits dans la région de nature plus ethno-tribale, comme autour de l’Azawad au Nord du Mali, en plus de renforcer des réseaux de narcotrafic et de contrebande déjà existants dans la région. De même, l’ingérence turque et qatarie dans la région n’a fait qu’ajouter plus de complexité à une situation déjà ingérable.

Tout d’abord, il est important de distinguer deux types de mouvements terroristes afin de mieux appréhender la complexité du phénomène.

Premièrement les groupes habituellement qualifiés de « Nébuleuses » comme « Al-Qaida », qui sont des mouvements « déterritorialisés », constitués d’un noyau dur, hiérarchisé, organisé, coordonné et efficace, caractérisé par une « proximité cognitive, idéologique et organisationnelle », mais pas forcément « géographique ». La deuxième composante de ces mouvements peut être qualifiée d’ « aléatoire » et de « périphérique« , et regroupe tous les actes isolés, qui peuvent êtres revendiqués ou non par le noyau dur en fonction des intérêts et des conséquences possibles. Étant « déterritorialisés », ces mouvements ne peuvent être portés que par des groupes de population de type nomades, qui ne voient dans la rhétorique d’Al-Qaïda par exemple qu’un prétexte idéologique à une insurrection tribale ou ethno-tribale, comme c’est le cas pour les mouvements combattants Touaregs dans l’Azawad, qui n’adhèrent que formellement au discours d’Al-Qaïda. N’oubliant pas que chez les Touareg ce sont les hommes qui sont voilés et pas les femmes.

La deuxième catégorie concerne les mouvements « territorialisés » et sédentaires, dont il est possible de situer le « Homeland » comme par exemple autour du Lac Tchad pour « Boko Haram », mouvement porté principalement par l’ethnie Kanouri, ou la région d’Al-Raqqah et de Mossoul en Syrie et en Irak pour « Daesh », deux régions majoritairement sunnites. En règle générale, ces « Homeland » correspondent à des substrats religieux ou ethniques, qui servent de support aux organisations en question, dont ils sont en quelque sorte le bras armé. Dans ce cas, l’adhésion à un discours religieux radical n’est qu’un prétexte idéologique à une insurrection ethnique ou ethno-religieuse.

La région sahélo-saharienne, théâtre d’opération de ces deux types de groupes terroristes, a historiquement été régentée ou encadrée par trois pôles stabilisateurs.

Premièrement l’axe « Le Caire-Khartoum »

L’axe allant du Caire au Nord à Khartoum au Sud a été grandement fragilisé aussi bien par la forte instabilité politique en Égypte depuis la chute de Moubarak en 2011, mais surtout par l’importante guerre civile qu’a connu le Soudan ayant aboutit à sa partition. Cet axe est désormais un important vecteur d’instabilité dans la région.

Deuxièmement l’axe « Tripoli/Tunis – Kano »

Du golfe des Syrtes, jusqu’au lac Tchad, le désert du Sahara est jalonné d’oasis, qui sont autant de point de relais permettant l’existante d’importantes routes commerciales, reliant la méditerranée au Lac Tchad. Cet axe commercial était permis par un vaste complexe et système d’alliances multi-tribales et multiethniques. Or, avec le chaos libyen et l’instabilité au Nord-est du Nigéria, ce réseau d’alliances est aujourd’hui mis en place et contrôlé par des groupes armés radicaux vivants du narcotrafic et de la criminalité. Au Nord, du coté libyen, cet axe est contrôlé par AQMI et par Daesh. Au sud, autour du Lac Tchad, c’est Boko Haram qui prend le relais, sachant que ce mouvement a prêté allégeance à Daesh.

  Enfin, l’axe « Fès-Marrakech-Tombouctou »

En Afrique de l’Ouest, le Maroc représente au moins depuis la dynastie Almoravide au XIème et par la suite sous les Saadiens, le cœur d’un axe commercial mais surtout civilisationnel, allant du fleuve Sénégal et de l’actuel Mali, jusqu’en occident en passant par l’Espagne. De ce fait, la composante civilisationnelle africaine est au cœur de l’identité et de la civilisation marocaine.

Dans cette région, l’Islam joue un rôle important, et vu que le Maroc fut le principal vecteur de diffusion de l’Islam dans la région, diffusion qui s’est faite principalement le long des axes commerciaux traversant le Sahara, cela vient renforcer le poids géopolitique et culturel du Maroc dans la région.

À titre d’exemple, la Tarika Tijania, qui est présente dans tout le Sahel occidental, a ses racines à Fès où est enterré son fondateur Ahmad Tijani, faisant de Fès et du Maroc un pôle essentiel et un centre spirituel pour des millions de Sénégalais et de Maliens.

De même, le titre de Commandeur des croyants, statut  reconnu bien au-delà des frontières du Maroc dans le Sahel Occidental par des millions de musulmans sénégalais, maliens et autres, fait du Roi du Maroc une figure paternelle, fédératrice et unificatrice pour toutes ces populations.

Ainsi, des trois axes cités précédemment, l’axe centré autour du Maroc est le plus homogène, le plus stable et le plus pacifié des trois, si l’on met de coté les troubles du Nord Mali. Et la encore, le problème Touareg au Mali est principalement le fait d’une gestion post-coloniale criminelle menée par la France, et qui continue sa politique d’ingérence politique et militaire dans ce pays. Cependant, le Maroc peut jouer et joue déjà un rôle de médiateur légitime aux yeux des deux belligérants (Gouvernement malien et les Touareg) qui pourrait aboutir dans les prochaines années à un règlement du conflit.

Ainsi, le Maroc incarne sur le continent africain une force et un pôle stabilisateur. Et la nouvelle diplomatie marocaine tournée vers l’Afrique et initiée par le Roi, part de ce noyau dur, de cette sphère civilisationnelle stable et pacifiée qu’est l’Afrique du Nord-Ouest, pour établir et étendre ses alliances et ses partenariats avec le reste de l’Afrique principalement anglophone.

Le nouveau Leadership du Maroc en Afrique qui s’inscrit dans une doctrine géopolitique continentale, et dont l’imminente réintégration au sein de l’Union Africaine n’est qu’une expression, est une invitation à rejoindre cette « pax marocana », dans une configuration multilatérale souveraine, africaine, basée sur le réalisme, le pragmatisme et l’intérêt mutuel, loin de tout clivage idéologique.

Ne dit-on pas que le commerce adoucit les mœurs ?


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