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Quel avenir pour le RNI, maintenant?


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Après 40 ans d’existence, le RNI n’a eu que trois présidents, Ahmed Osman, de 1978 à 2007, Mustapha Mansouri, de 2007 à 2010, Salaheddine Mezouar de 2010 à samedi dernier.

Le quatrième président a été élu, plébiscité à presque 95% des voix des congressistes présents. Il s’agit de Aziz Akhannouch, ministre de l’Agriculture et de la Pêche Maritime depuis environ 10 ans, patron milliardaire du groupe Afriquia et ancien membre du parti qu’il avait quitté en 2012 pour pouvoir être reconduit à son ministère de l’Agriculture.

Fort bien, et maintenant ? La question qui est sur toutes les lèvres est, bien évidemment, de savoir si le RNI maintiendra son alliance de raison avec le PJD d’ Abdelilah Benkirane ou s’il prononcera son oraison, rejoignant le PAM qui s’apprête à traverser les cinq prochaines années dans l’opposition.

Contrairement au PAM, qui n’a été créé que pour affronter le PJD, sans approche idéologique bien marquée, le RNI est un parti de notables, de tendance libérale, et de plus en plus libéré. Jusqu’à 2013, il n’était vraiment qu’une formation fourre-tout, qui enrichissait sa direction d’un personnel fait de bric et de broc, compétent certes, mais éclectique. Et jusqu’en 2013 aussi, le RNI a été un parti d’appoint des majorités gouvernementales successives.

Pourquoi jusqu’en 2013 ? Parce que cette année-là, le RNI a fait une entrée spectaculaire au gouvernement de Benkirane sachant que le gouvernement, délesté de l’Istiqlal, peinait à satisfaire aux contraintes d’un gouvernement dont on attendait tant. Retrouver les grands équilibres macroéconomiques, assurer l’emploi, faire de la politique, dans un pays qui n’en avait jamais vraiment connu.

Et ainsi donc, de 2013 à 2016, de heurts en malaises, de conflits larvés en propos énervés, d’alliances de circonstances à des postures avec trop peu de prestance et d’élégance, le gouvernement Benkirane a quand même avancé. Au final, la Caisse de compensation a été réformée, décompensant les hydrocarbures, et ramenant cet organisme budgétivore de 55 milliards de DH en 2012 à 15 milliards de DH cette année ; par ailleurs, la réforme des retraites a été lancée, et réussie, malgré de fortes contestations sociales. Les déficits ont reculé, celui du PIB en premier, et l’inflation maîtrisée. En revanche, l’endettement a explosé.

Mais tout cela ne fait pas une alliance heureuse, et force est de reconnaître que RNI et PJD ne se sont jamais vraiment appréciés, le premier critiquant l’hégémonisme du second et celui-ci accusant le premier d’inféodation au PAM ou à d’autres, plus haut.

Alors, le RNI doit-il entrer, ou non, dans le gouvernement Benkirane de cette législature? Tout le monde dit que oui, mais il semblerait que non ; il serait préférable que le RNI aille dans l’opposition, et s’y fasse une identité. Mais on dit aussi que le RNI est un parti de gouvernement, pas d’opposition. Certes, mais alors il n’est pas un parti du tout et tout court, car une formation politique doit savoir vivre dans l’opposition, comme au gouvernement.

Que le RNI de Aziz Akhannouch quitte le bateau gouvernemental donc… Il en souffrira très certainement, il perdra certains de ses caciques prêts à se vendre au plus offrant, mais il ne s’en portera que mieux. On y verra plus clair, et une ossature intéressante pourrait sortir de tout cela.

Que ferait donc le RNI dans l’opposition? Il y remplacera, voire y supplantera, le PAM. En effet, si l’idée d’un PAM dominant le pôle moderniste est bonne, pour faire pendant au camp conservateur porté par le PJD, le projet PAM aura cependant montré ses limites. Ayant perdu deux élections en un an, il aura très certainement de la peine à s’en relever, surtout qu’il a perdu en cours de route plusieurs de ses membres les plus éminents (Khadija Rouissi, partie à Copenhague, Saleh el Ouadie, parti chez lui, Fatiha Layadi, en rupture de ban du parti et bien d’autres encore…).

En trois ans, de 2013 à 2016, le RNI a gagné en maturité, ses chefs ont gagné en crédibilité, mais numériquement, le parti n’a rien engrangé en quantité. Or, un parti, ce sont d’abord ses militants, nombreux, disciplinés, mobilisés, et qu’un chef charismatique saurait électriser. C’est le cas du PJD, mais ça l’est moins pour le PAM. Et au RNI ? Akhannouch pourrait tenir ce rôle.

Dans le cas contraire, un RNI au gouvernement, avec Akhannouch à son poste de l’agriculture, serait affaibli par un Benkirane plus fougueux que jamais et porté par l’onction populaire et la bénédiction royale. Son jeu sera d’isoler le PAM dans l’opposition, et de s’adjoindre l’ensemble des autres formations. Il a déjà le PPS dans sa poche, et il vient d’y ajouter l’Istiqlal. L’USFP ne devrait pas poser de problèmes et le MP frétille à l’idée de rempiler.

Or, le RNI a déjà en quelque sorte phagocyté l’UC. Au parlement, et même si son groupe avec ce parti, totalisant 56 députés, sera moins nombreux que celui du PAM et ses 102 élus, il aura pour lui l’expérience de la politique, la conscience des choses et la prescience des problèmes. Et pendant ce temps-là, Akhannouch, très populaire dans le monde rural et très connu en milieu urbain, apprécié par tout et de tous, sillonnera les verts pâturages du pays et ses villes encombrées ; il aura le temps d’endosser l’habit du politique, du vrai, de l’opposant, le vrai, de l’homme d’Etat, celui qu’il aspire à être, un jour.

Pour cela, un passage par l’opposition est donc plus que nécessaire, pour pouvoir rencontrer et affronter, en 2021, un Benkirane usé par 10 ans à la tête du gouvernement. Dans le cas contraire, au gouvernement, Benkirane risque de ne faire qu’une bouchée du nouveau président, et de son parti.


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