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Pas de trêve hivernale pour les morts de migrants


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La semaine dernière, en début de semaine, nous disions – et pensions avec un certain soulagement que l’hiver allait réduire la vague migratoire et les morts atroces qui l’accompagnent. Hélas, dès jeudi, nous savions que ce ne serait pas le cas. 24 morts, dont 10 enfants s’étaient échoués en Grèce. Samedi, 37 corps de plus ont alourdi les eaux de la Mer Égée. Et la presse ces derniers temps se fait l’écho d’une enquête d’Europol parlant d’au moins 10 000 enfants migrants, isolés portés disparus dans les limbes d’une Europe qui ressemble à l’Enfer pour qui n’est pas baptisé conforme par l’administration.

Oui, cette chanson n’a jamais été aussi flippante, je sais. Mais il faut dire que la situation n’est pas jolie-jolie, alors qu’en Allemagne, on commence à nous expliquer qu’il faut tirer sur les migrants. Vous me direz, n’allons pas nous indigner de ce que la Hongrie a autorisé l’armée à faire depuis au moins 6 mois. Si ce n’est que l’Allemagne nous avait habitué à être la voix de l’utopie, tandis que la Hongrie, comment dire ?

Oui, bon, voilà. Alors, on sait que les migrants vont être des millions à s’échouer sur nos rives des deux côtés de la méditerranée. Des millions, en très peu de temps. Entre le petit Aylan et Cologne, tous les fantasmes se déchaînent sur une réalité trop grande pour être appréhendée par l’esprit humain. Entre ceux qui voudraient bien mais qui peuvent point, ceux qui voudraient contrôler les invasions barbares, ceux qui, angélistes, refuseraient de se poser les questions qui font mal sur l’intégration d’une population non uniforme mais dont le point commun est la désintégration de tout ce qui constitua, jusqu’à lors, des repères. Comment prendre en compte une réalité plus grosse que soi ? On n’a que deux moyens, tous deux inadaptés, tous deux problématiques : l’exemple précis. Cologne ou bien Aylan, le particulier devenant symbole de ce qu’est l’ensemble, un ensemble que l’on ne peut réfléchir et traiter qu’en généralité. Et nous voilà sur notre deuxième problème : le traitement à la chaîne, la règle générale qui ne souffre pas d’exception. Quand est-ce que l’on a commencé à traiter l’humain de manière efficace ?

Oui, voilà, la modernité, et d’entre tous ses attributs, la modernité appliquée à l’humain… en camp. Oui, en camp, de travail, d’étrangers indésirables puis camps de la mort. Une autre époque dont les relents sont là, pas seulement dans les discours d’extrêmes, mais aussi dans la manière dont, froidement, nous traitons les données des migrants. Tant de millions en mouvement, tant de morts, tant d’embarcations échouées, statistiques de l’infâme qui s’ajoutent comme autant d’informations dont la valeur n’est pas remise en cause, jamais, car objective, permettant d’appréhender le réel, n’est-ce pas ? Mais non. La solution n’est ni dans le cas particulier, ni dans la normalisation de l’abstrait horrifique.

Redevenir humain, quel beau concept mais comment ? Et comment des états, par nature inhumain – et ce n’est pas une critique, juste un constat– peuvent le devenir. Je ne sais pas. Encore une fois, si j’avais des solutions, je les mettrais en œuvre, je ne resterais pas là les bras croisés. Est-ce que ce serait cela, alors, la solution ? Cesser de se sentir impuissant. Cesser de penser aux conséquences forcément désastreuses quand nous sommes rationnels, pour n’envisager que l’action immédiate. Après tout, on ne vit pas dans l’avenir, aussi noir soit-il, mais bien daba, maintenant, now.

Cesser de se sentir impuissant, mais pas seulement au niveau individuel, où il importe d’agir, oui, agir et le plus vite possible, à tous points de vue ! Oui, mon truc à moi c’est la culture, est-ce négligeable ? Je ne crois pas, je dois croire que ce n’est pas le cas. Mais agir, en tous les cas. Mais pour les états, ceux qui ne peuvent pas accueillir toute la misère du monde, auront-ils le choix, quoi qu’il en soit ? Et pas seulement ceux de là-bas, mais le nôtre aussi. La France, l’Allemagne ou le Maroc, même combat : toujours mieux que la mort assurée, bien des gens vont venir, qu’on veuille les voir ou pas, qu’on les attende avec des fleurs ou des flingues. Alors comme d’habitude, apocalypse et pluie de grenouille, mais de toute façon, quelle importance ? Un jour nous mourrons et nos sociétés aussi, sans doute. Mais à vouloir nous préserver en dépit de l’humain, à être inerte, est-ce que nous n’embaumons pas avant l’heure ? Il faudra bien que l’on accepte de repenser le monde différemment, parce que sinon, aux problèmes d’aujourd’hui, nous n’apporterons que le renouvellement des échecs d’hier. Des millions de morts, dont pas mal, statistiquement appréhendés, en camps.


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