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Le Maroc face au péril du « mondialisme »


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Le récit de la « tour de Babel » tel que décrit dans l’ancien testament dans le livre de la Genèse, décrit sur un ton mythique et profondément symbolique l’aspect contre-nature et blasphématoire de toute tentative d’uniformiser l’humanité. L’altérité, la diversité et la pluralité des nations et des peuples traduiraient donc, au-delà de toute lecture anthropologique, la volonté de Dieu d’une humanité plurielle. Or, en quelques décennies, la mondialisation a servi de vecteur à une dynamique sans précédent d’uniformisation et d’homogénéisation des pratiques culturelles, des mentalités, et des modes de consommation.

Cependant, la mondialisation en tant que dynamique historique d’élargissement sur un plan géographique des échanges économiques et culturels a toujours existé, bien que le progrès technique a donné à cette dynamique une ampleur sans précédent, donnant aujourd’hui lieu à un monde intégralement connecté pour le meilleur et pour le pire. Ainsi, si la « mondialisation » relève d’un simple impératif d’étendre les circuits d’échange économique à toute la planète, il en va autrement du « mondialisme », qui procède d’une idéologie, d’une mystique et d’un messianisme sans Dieu.

Le « mondialisme », traduit la volonté d’une certaine élite, économique, intellectuelle et politique, de mettre en place une « gouvernance mondiale », qui naitrait du transfert progressif puis définitif des souverainetés nationales, vers des entités supranationales, en faisant disparaitre les frontières, les nations et les Etats, dans une grande « région monde ». C’est une métaphysique fondée sur l’idéal messianique d’unification du genre humain, avec l’idée de « l’homme-Dieu » retrouvé, telle que fantasmée par certains intellectuels comme Jean-Baptiste Cloots, auteur de « la révolution universelle », pour qui l’ « humanité ou le genre humain ne vivra en paix que lorsqu’il ne formera qu’un seul corps, une nation ».

Parmi les maîtres à penser de cette idéologie figure le Colonel Edward Mandell House par exemple, qui fut :

  • Conseiller du président Wilson.
  • Principal architecte du traité de Versailles et de la déclaration de la Société des Nations,
  • et Co-fondateur avec des gens de la haute finance américaine (Paul Warburg, Frank Vanderlip, J.P Morgan et d’autres) du CFR, le Council on Foreign Relations en 1921, Think-Tank qui oriente et influence dans une grande mesure et jusqu’à aujourd’hui la politique étrangère américaine, qu’elle soit démocrate ou républicaine.

Et parmi les contemporains, on peut citer l’incontournable et influent Jacques Attali, qui dans son « dictionnaire du XXIème siècle » nous apprend qu’ « Après la mise en place d’institutions continentales européennes, apparaitra peut-être l’urgente nécessité d’un gouvernement mondial » en proposant « Jérusalem » comme capitale mondiale. Il propose ainsi de fusionner le plut tôt possible le « Conseil de sécurité », le « G20 » et le « FMI » afin de servir de plate-forme à un futur gouvernement mondial.

Cette vision « panthéiste » de la politique, portée principalement par le monde anglo-saxon, mais avec des relais intellectuels et politiques dans plusieurs pays, se veut humaniste altruiste et droit-de-l’hommiste. Or, l’histoire nous apprend qu’il faut se méfier comme de la peste de toutes les idéologies qui entendent généraliser ou imposer le bonheur à tout le monde. Car au-delà de la rhétorique fraternaliste, voir paternaliste du mondialisme, les mécanismes déployés pour mettre en place le projet sont d’une toute autre nature.

Sur un plan institutionnel, le transfert progressif de la souveraineté des Etats vers des structures supranationales se traduit naturellement par le recul de l’Etat providence et l’extension progressive de la logique du marché à toutes les sphères, donnant lieu à une aggravation sans précédent des inégalités économiques sociales, tandis que la réification des liens sociaux et la marchandisation de la culture qui en découlent donnent lieu à un effondrement culturel des populations, à un déracinement et à la montée effrénée de l’individualisme. Le FMI et la BM, deux des principaux bras armés du mondialisme, veillent à ce que tous les pays passent tôt ou tard sous leurs fourches caudines.

Sur un plan territorial, les accords de libre-échange, et les unions douanières et monétaires préparent le terrain à la mise en place de blocs économiques continentaux, qui se construisent par démantèlement des Etats-Nations ayant initié l’union, le but étant d’aboutir à une union politique continentale. Ainsi, la création de l’UE, et la mise en place de l’UNA, vise, à terme, à fusionner les deux blocs continentaux dans un grand espace nord-atlantique, qui sera économique dans un premier temps, notamment à travers le TAFTA (Traité de libre-échange transatlantique).

Par contre, pour les pays non-occidentaux, comme par exemple pour le monde musulman, deux choix nous sont proposés :

  • Il s’agit dans le cadre de cette philosophie d’instaurer un modèle propre aux référents idéologiques du mondialisme. En d’autres termes : le primat du marché, les droits de l’Homme, l’universalisme, et le recul de l’Etat par le concept de « gouvernance ». Cela implique une refonte totale des institutions qui passe par une décentralisation du pouvoir, une régionalisation, et une réforme en profondeur de l’Islam en vue de le vider de tout potentiel de subversion et de résistance.
  • Les élites de ces pays ont ainsi la possibilité d’adhérer volontairement à cette foi mondialiste et d’en devenir les prometteurs.
  • Dans le cas contraire, où quand ça se fait trop lentement, le système opère une thérapie de choc qui peut prendre la forme de pseudo-révolution colorée (le printemps dit arabe), de guerres civiles ethno-confessionnelles (Syrie, Irak, Liban), ou par l’activation des identités régionales indépendantistes en vue d’accélérer la dislocation des Etats-Nations dans le monde musulma

Cette stratégie est devenue publique en juin 2006 avec la publication d’un article par le lieutenant colonel américain, Ralph Peters, dans une revue militaire américain (AFJ). On peut y voir deux cartes du Moyen-Orient, la première est la carte actuelle de la région avec les frontières reconnues. Tandis que l’autre carte propose un Moyen-Orient recomposé autour de petits pays sur une base ethno-confessionnelle, issue de la désintégration de tous les Etats de la région.

Or, grâce aux travaux d’Israel Shahak, nous savons que ce projet est beaucoup plus ancien que les années 2000, et que c’est du coté de Tel-Aviv qu’il faut aller voir, puisqu’un article publié en hébreu en 1982 par Yoded Yinon, ancien fonctionnaire au Ministère des Affaires Étrangères israélien, dans la revue sioniste « World Zionist Organisation » et reproduit récemment dans « Confluences méditerranée », propose la même stratégie pour le Moyen-Orient. Le plan de Yinon procède en deux étapes :

  • Premièrement, Israël doit devenir une puissance impériale régionale visant à restaurer le grand Israël qui va du Nil à l’Euphrate.

  • Deuxièmement, le monde musulman qui ne représente une menace qu’à court terme pour Israël doit être remodelé, en disloquant ces pays en petits Etats sectaires et ethno-confessionnels, qui deviendront malgré eux des Etats satellites de l’Etat Hébreux.

Partant de là, on comprend mieux le discours de SM le Roi prononcé en 2016 à Ryad où le souverain fait le constat suivant en disant : « La région arabe vit, en effet, au rythme de tentatives de changements de régimes et de partition des Etats, comme c’est le cas en Syrie, en Irak et en Libye, avec tout ce que cela comporte comme tueries, exodes et expulsions d’enfants de la patrie arabe. ».

Puis le Souverain poursuit en affirmant : « Il y a cependant de nouvelles alliances qui risquent de conduire à des divisions et à une redistribution des cartes dans la région. Ce sont, en réalité, des tentatives visant à susciter la discorde et à créer un nouveau désordre n’épargnant aucun pays, avec des retombées dangereuses sur la région, voire sur l’état du monde. ».

Ainsi, entre une BM et un FMI qui nous poussent d’un coté vers plus de marché et vers moins d’Etat, et un identitarisme régional qui vient se greffer sur une situation de profonde injustice économique de l’autre, notre pays paye le prix de plusieurs décennies. D’abandon progressif  d’une partie de notre souveraineté économique à travers une libéralisation de plus en plus poussée, qui ne profite qu’à une petite élite rentière, et déracinée, devenant de fait une 5ème colonne du mondialisme.

Nous payons également le prix de plusieurs réformes au niveau institutionnel qui ont fini par priver l’Etat de toute capacité de mobilisation et d’initiative au niveau économique et social. Enfin, nous payons le prix de plusieurs boulevards ouverts à une « modernité » qui n’est pas nôtre, et qui est en train de déstructurer notre société, notre famille, notre école, notre culture, donnant lieu à une explosion de violences, d’insécurité, de suicides et de drames.

Jaurès avait dit en son temps « À celui qui n’a rien, la Patrie est son seul bien ». Or quand de plus en plus de marocains se sentent étrangers à cette Patrie à travers laquelle ils ne trouvent plus de dignité, il ne leur reste que leur identité immédiate, c’est-à-dire religieuse ou ethnoculturelle. Et je vous le redis, si nous continuons sur le chemin du mondialisme et de la modernité occidentale, nous allons droit vers une rupture sans retour possible entre les principaux perdants de ce nouveau paradigme, le peuple, et une certaine élite apatride et mondialiste qui profite de rente tout simplement obscène, grâce à un système quasi-généralisé de corruption.

Cependant, nous avons au Maroc la chance d’avoir une structure qui incarne sur un plan politique et culturel, un potentiel de résistance au rouleau compresseur du mondialisme, c’est la Monarchie. Or, la seule synergie qui pourrait nous sauver, est celle qui peut exister et qui peut se développer entre la Monarchie et le Peuple dans sa globalité. Seulement, son efficacité dépendra de la capacité du Peuple à produire une élite économique, culturelle, intellectuelle et politique enracinée, patriotique, et attachée à la culture et à l’identité marocaine. On est dans une guerre civilisationnelle où la principale bataille se déroule sur le terrain de l’identité et des concepts. Et nous n’avons pas le droit de la perdre.


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