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Auberge espagnole ou gouvernement marocain


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En darija, on dit que « ketret el hemme kaddehhek », une variante du fameux « mieux vaut en rire »… Et c’est vrai que lorsqu’on voit les évolutions et circonvolutions de la politique marocaine, cela prête à sourire, voire à rire, et peut-être même, n’eût été l’importance de la chose, à s’esclaffer…

Récapitulons… Le 7 octobre, sur les 27 millions de Marocains en âge et en situation de voter, seuls 17 millions se sont inscrits sur les listes électorales. Sur ces 17 millions, ils ne sont que 6,7 millions à s’être déplacés le jour dit, et parmi eux, 1,6 million de Marocains ont choisi le PJD. Ce dernier arrive premier, donc… le chef de l’État, pour lequel le temps signifie quelque chose, appelle le chef du gouvernement sortant Abdelilah Benkirane 24 heures après l’annonce des résultats, et le charge de former un gouvernement.

La légalité constitutionnelle est respectée, la méthodologie démocratique est constatée, et la logique générale est amplement acceptée. Et c’est là que les problèmes commencent.

Le PJD, avec 25% des voix exprimées, 10% du corps électoral et 6% du total potentiel des électeurs, crie au triomphe électoral, et décrie tous ceux qui n’en sont pas convaincus. Quiconque voudrait négocier avec Benkirane est un traître à la volonté populaire, un félon de la démocratie, un empêcheur de tourner en rond… Benkirane s’est subitement transformé en Benkicrane.

Le PPS de Nabil Benabdallah, on le sait, a contracté un mariage catholique avec les islamistes parce que ce mot rime quelque peu avec ex-communistes.

Et les négociations démarrent. Hamid Chabat de l’Istiqlal s’y voit déjà, masque mal son impatience d’y être, et va dire à tout le monde qu’il y est. Dans  la foulée, il appelle son alter ego de la Koutla Driss Lachgar et lui murmure à l’oreille qu’il doit y être aussi, pour ne pas être dans un difficile, improbable et incertain ailleurs. Lachgar dit oui, avant de dire non, puis peut-être, puis qui sait… et on n’en sait toujours rien à l’heure de l’écriture de ces lignes. Lui non plus, certainement…

Le Secrétaire général du PAM Ilyas El Omari, grand pourfendeur des islamistes, se sachant aller inéluctablement à l’opposition, voire y rester puisqu’il y était, se fend d’une belle lettre de réconciliation, convoquant l’Histoire, louant le présent et interpellant l’avenir, exhortant les uns et les autres à raison garder et à bien regarder où ils mettent leurs pieds. Personne ne lui répond, alors il se renfrogne, et se renferme.

Le MP de Mohand Laenser va chez Benkirane et ne lui dit pas oui, ni franc ni massif, ne lui oppose pas un non agressif mais se contente d’un peut-être sous des conditions qu’il ne semble pas lui-même connaître.

Arrive le RNI… Salaheddine Mezouar s’en va, pendant qu’Aziz Akhannouch s’en vient, portant sous le bras la petite UC, le tout à la surprise de tous, et à la grande colère de Benkirane, qui sait le nouvel arrivant rude en négociation et rugueux quand il le faut. Discussion entre eux, entre quatre yeux, et Benkirane va alors tout déballer aux médias, s’attirant les foudres d’Akhannouch. Ambiance morose…

Et dire que le roi appelait, depuis Dakar, à un gouvernement cohérent et homogène et que tous les chefs de partis s’en sont félicités, congratulés, avant de faire l’exact contraire.

Alors, au final, nous risquons d’avoir un gouvernement dirigé par des islamistes modérés, avec des communistes repentis, des nationalistes sur le retour (et de retour), des socialistes malgré eux, des libéraux bleus en politique mais toujours pourvoyeurs d’équilibres arithmétiques, et une UC qu’on ne peut classer nulle part, sauf peut-être dans les mauvais souvenirs de l’histoire récente du Maroc…

Voilà pourquoi le royaume pourrait contribuer à l’enrichissement de la langue française, en faisant évoluer l’expression « auberge espagnole » en « gouvernement marocain », qui serait comme une « armée mexicaine », avec ses « têtes de Turcs » qui nous feraient leurs « histoires belges » dans ce « mariage à l’italienne »…

On le disait, mieux vaut en rire car avec un tel gouvernement, les 5 prochaines années seront à pleurer…


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