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partis de l’administration

Les partis de l’administration


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partis de l’administration

Il s’agit d’une nomenclature bien marocaine… partis de l’administration pour être gentil, partis- « cocotte-minute » pour être plus méchant, voire persifleur. Alors, qu’est-ce  qu’un parti de l’administration ?

Selon une définition communément adoptée par la classe politique et, plus généralement, par ceux qui s’intéressent à la chose publique et politique, il s’agit de partis qui ont été fondés, comme leur nom l’indique, par l’administration, en des temps records, d’où le sobriquet « cocotte-minute ». Et quand on disait administration, dans les années 80, il s’agissait du Ministère de l’Intérieur de feu Driss Basri.

Rapide chronologie des faits, en glissant sur le premier de ces partis, l’éphémère Front de défense des institutions démocratiques d’Ahmed Reda Guedira, qui devait affronter dans les années 60 Istiqlal et UNFP… En 1976, il n’y avait comme partis que ceux du Mouvement National, en l’occurrence l’Istiqlal, le PPS,  et l’USFP, avec une UNFP vidée de sa substance et de ses membres, et un Mouvement Populaire qui ne trouvait toujours pas sa voie. En face, rien… le roi Hassan II, à l’époque, avec son tout jeune ministre de l’Intérieur Basri, avait alors ouvert la voie des urnes aux candidats indépendants, plus tard réunis et regroupés sous le nom de Rassemblement National des Indépendants et placés sous la prudente et rassurante direction d’Ahmed Osman, beau-frère du roi.

Puis  les scissions avaient commencé, à la manière des poupées chinoises : le RNI s’est scindé en 1982 pour donner le PND, puis ensuite l’Union Constitutionnelle un an plus tard… les deux partis ont été créés par des hommes du sérail, directs ou indirects Maâti Bouabid pour l’UC et Arsalane el-Jadidi pour le PND. D’autres officines devaient par la suite voir le jour, mais elles sont restées confidentielles.

Arrive le roi Mohammed VI qui, contrairement à son père, a introduit une nouvelle culture politique. Respect des échéances électorales, et retrait progressif du Ministère de l’Intérieur de l’opération électorale. Depuis 2011, tous les acteurs politiques, opposition ou majorité sont en accord sur le fait qu’il n’y a plus tripatouillage des urnes.

En 2008, le PAM était créé par l’actuel conseiller du roi Fouad Ali al Himma, qui était alors député. La personnalité de son fondateur et la nature bigarrée et bariolée de ses membres l’ont immédiatement fait cataloguer par les partis du Mouvement National et par le PJD de parti de l’administration, sans préjudice pour cette appellation toujours accolée aux autres partis dits de l’administration.

Aujourd’hui, ces formations ne sont que l’ombre d’elles-mêmes, ayant été soutenues à bout de bras par l’Intérieur et ses comptages particuliers  des suffrages. L’UC descend à n’en plus finir dans les abysses des mauvais scores électoraux, le MP suit le mouvement, le PND a disparu, mais le PAM et le RNI se maintiennent à flots, malgré un recul de ce dernier aux dernières législatives. Peut-on parler en ce qui concerne ces deux derniers de partis de l’administration ? Non, car les conditions politiques ont changé et les ministres de l’Intérieur également, plus technocrates, moins politiques, nettement moins politiciens et résolument moins interventionnistes.

Toutefois, le PAM semble connaître une très sérieuse crise de légitimité et d’existence, en raison de l’étirement des chapelles idéologiques de ses membres, entre anciens gauchistes et nouveaux opportunistes, entre jeunes cadres en mal d’idéologie et vieux routiers en mal de reconnaissance. Ce parti a été créé avec un vice et une tare, tous deux rédhibitoires : il a vu le jour dans l’opposition au PJD, et on ne crée pas un parti pour lutter contre un autre mais pour défendre une idéologie. Ensuite, il a semblé lier son existence au fait de se classer premier. Il ne l’a pas été, malgré ses 102 voix, et son avenir est, à terme, devenu incertain.

Il en va différemment du RNI qui, avec Aziz Akhannouch, connaît enfin une seconde naissance à travers un président haut en couleurs, actif et agressif. Ce n’était pas le cas de Salaheddine Mezouar, de Mustapha Mansouri et encore moins d’Ahmed Osman. Mais le fait qu’Akhannouch ait été ministre technocrate dix ans durant, qu’il est crédité d’une amitié personnelle avec le chef de l’Etat et qu’il soit arrivé sans que personne ne l’attende, conduit les contempteurs du nouveau président à le qualifier de « parachuté » et les adversaires du RNI à lui accoler l’étiquette de parti de l’administration.

Il l’a été, il a essayé de se défaire de cette qualité mais il a toujours échoué. Car ses cadres sont des commis de l’Etat et aussi parce qu’il n’a pas d’idéologie connue. Akhannouch gagnerait donc à réfléchir au positionnement de son parti, à lui donner une âme, en plus d’une couleur, à le faire fonctionner comme un vrai parti et à le doter de médias visibles, audibles et si possible crédibles. Ainsi peut se résumer le challenge que doit relever Akhannouch. Il le veut, il le peut, mais le fera-t-il ? C’est là toute la question pour avoir, enfin, un pôle libéral et socio-démocrate qui manque à notre paysage politique.


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